Chine et Etats-Unis : vers un passage de relais ?

Mis en ligne le 06 Mai 2019

Avec cet article, l’auteur aborde la question de la compĂ©tition stratĂ©gique entre la Chine et les Etats-Unis. L’auteur met en balance le poids militaire de ces deux puissances, pointant leurs forces et faiblesses respectives dans une perspective de moyen-long terme, soulignant ainsi les ambitions globales et rĂ©gionales de PĂ©kin.


Les opinions exprimĂ©es dans cet article n’engagent pas le CSFRS.

Les références originales de ce texte sont: « Chine et Etats-Unis : vers un passage de relais ? » de Vincent Satgé.

Ce texte, ainsi que d’autres publications, peuvent ĂȘtre consultĂ©s dans l’ouvrage ConflictualitĂ©s modernes et postures de dĂ©fense.

 


« Fuguo qiangbing » : « enrichir le pays, renforcer l’armĂ©e ». Cette maxime chinoise, tirĂ©e de l’époque des Royaumes combattants [1], est la formule typiquement employĂ©e par les rĂ©formistes chinois depuis Deng Xiaoping [2]. Enrichir le pays, il semble que cela ait Ă©tĂ© largement entrepris. Non seulement la Chine est devenue la deuxiĂšme Ă©conomie mondiale en termes de produit intĂ©rieur brut (PIB), et peut-ĂȘtre bientĂŽt la premiĂšre, mais elle dĂ©tient assurĂ©ment une inïŹ‚uence ïŹnanciĂšre non nĂ©gligeable sur ses plus proches voisins, comme en tĂ©moigne l’Asian Infrastructure Investment Bank [3]. Avec le retrait du Trans-PaciïŹc Partnership annoncĂ© par Donald Trump [4], alliance Ă©conomique qui en excluait la Chine quand de nombreuses autres nations du PaciïŹque y Ă©taient associĂ©es, mais aussi la dĂ©fense de l’ordre Ă©conomique libĂ©ral international [5] par le PrĂ©sident chinois Xi Jinping, le passage de relais stratĂ©gique dans le Sud-Est asiatique semble clairement s’opĂ©rer s’il n’a pas dĂ©jĂ  eu lieu. Renforcer l’armĂ©e, cela semble bien engagĂ© Ă©galement. DĂ©jĂ  le fondateur de la Chine communiste, Mao Zedong, ne minimisait-il pas l’aspect Ă©conomique en afïŹrmant que « le pouvoir politique sort de la bouche du canon [6] » ? Ses successeurs ont toujours favorisĂ© l’acquisition de puissance et Xi Jinping, constatant le niveau atteint par son pays en la matiĂšre, propose dĂ©sormais aux États-Unis un « nouveau type de relations entre grandes puissances [7] », notamment dans la zone PaciïŹque. Cette nouvelle approche, qui se veut principalement diplomatique, comporte nĂ©anmoins d’importants volets militaires : rĂ©ponse Ă  la question nord-corĂ©enne, traitement du dossier TaĂŻwan, disputes de souverainetĂ© dans la mer de Chine.

Face Ă  la premiĂšre puissance mondiale et Ă  l’ensemble de ses voisins, la Chine est-elle en mesure de concurrencer la puissance stratĂ©gique des États-Unis aprĂšs les avoir rattrapĂ©s sur celui de l’économique ? Mais, si elle a fait des progrĂšs considĂ©rables dans la modernisation de ses capacitĂ©s militaires, PĂ©kin reste encore hors d’atteinte de celles de Washington, Ă  l’échelle rĂ©gionale et a fortiori mondiale. NĂ©anmoins, l’empire du Milieu pourrait bien avoir posĂ© les bases d’une maĂźtrise Ă  moyen-long terme d’une zone PaciïŹque-Est, qu’il considĂšre comme son aire naturelle d’inïŹ‚uence.

La puissance militaire chinoise a indéniablement fait des progrÚs considérables

Bien que longtemps reconnue comme l’armĂ©e la plus grande du monde, forte de ses 2,2 millions de soldats et de ses cohortes de blindĂ©s (9 000 unitĂ©s), l’ArmĂ©e populaire de libĂ©ration (APL) a souffert d’une image d’armĂ©e de paysans-soldats dont la valeur opĂ©rationnelle restait trĂšs incertaine, du moins pour beaucoup d’entre eux. SouhaitĂ©e par les cadres du Parti communiste aprĂšs la guerre sino-vietnamienne de 1979 qui s’est soldĂ©e par une dĂ©faite chinoise, une rĂ©forme militaire a Ă©tĂ© entreprise sous la houlette du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du parti, Deng Xiaoping. Au cours de la dĂ©cennie 1990, cette transformation a aussi cherchĂ© Ă  rĂ©pondre Ă  un contexte sĂ©curitaire qui a fortement marquĂ© les autoritĂ©s chinoises : la guerre du Golfe de 1991 qui a montrĂ© le caractĂšre dĂ©cisif des technologies de l’information et de la communication encore peu dĂ©veloppĂ©es en Chine ; la crise des missiles de TaĂŻwan en 1995-1996 oĂč la puissance navale chinoise a montrĂ© son net dĂ©classement devant celle des États-Unis ; et le bombardement de l’ambassade chinoise Ă  Belgrade pendant la guerre du Kosovo de 1999, orchestrĂ© par la CIA selon PĂ©kin. Les rĂ©sultats de cette mutation, qui est toujours en cours, ont Ă©tĂ© pour le moins spectaculaires, notamment au tournant du XXIe siĂšcle. Ainsi, l’augmentation annuelle du budget de dĂ©fense chinois a Ă©tĂ© portĂ©e Ă  deux chiffres depuis la ïŹn de la dĂ©cennie 1990. Les seules annĂ©es 2013 (+ 10,7 %), 2014 (+ 12,2 %) et 2015 (+ 10,1 %) [8] montrent la tendance fortement haussiĂšre des dĂ©penses chinoises. Au total, 145 milliards de dollars ont Ă©tĂ© investis par le gouvernement chinois dans sa dĂ©fense en 2015 [9]. C’est l’équivalent, selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), de plus de quatre fois les dĂ©penses des pays de l’Association of South East Asian Nations (ASEAN) ou plus que les dĂ©penses de dĂ©fense combinĂ©es du Japon, de la CorĂ©e du Sud et de l’Inde.

En outre, des rĂ©formes ont Ă©tĂ© entreprises pour transformer la gouvernance de l’armĂ©e [10] et la rendre digne d’une armĂ©e moderne. Ainsi, sous la houlette du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Xi Jinping, la Commission militaire centrale a pris le contrĂŽle direct de l’armĂ©e de terre et a refondu les rĂ©gions militaires pour les faire passer de sept Ă  cinq, permettant une centralisation du commandement militaire de nature Ă  le rendre plus efïŹcace en cas de conïŹ‚it. La Chine s’est parallĂšlement construite une solide base industrielle et technologique de dĂ©fense. Entre 1998 et 1999 et sous l’impulsion du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Jiang Zemin, le projet « 998 [11] », visant Ă  dĂ©velopper la nouvelle gĂ©nĂ©ration d’armement chinois, a dessinĂ© une feuille de route ambitieuse de modernisation de l’outil opĂ©rationnel et industriel de dĂ©fense. Les rĂ©sultats sont Ă©loquents : ainsi, en 2015, selon le SIPRI, neuf conglomĂ©rats de dĂ©fense chinois ïŹgurent dans les 100 premiĂšres entreprises de dĂ©fense, dont deux dans les dix premiĂšres (AVIC [12] pour l’aĂ©ronautique et NORINCO [13] pour les systĂšmes d’armement terrestre).

Les rĂ©sultats technico-opĂ©rationnels de cette montĂ©e en puissance sont marquants. C’est tout d’abord la crĂ©ation d’un groupe aĂ©ronaval structurĂ© autour du porte-avions Liaoning (rachetĂ© Ă  la Russie et modernisĂ© par la Chine) qui est dĂ©clarĂ© prĂȘt au combat en novembre 2016, tandis que deux autres sont en cours de construction indigĂšne. Il sera accompagnĂ© de missiles de croisiĂšres air-mer, terre-mer, mer-mer chinois tels que le Ying-Ji 12, ou encore des chasseurs-bombardiers aĂ©ronavals Shenyang J-15. C’est ensuite le dĂ©veloppement de technologies aĂ©riennes de derniĂšre gĂ©nĂ©ration, avec les programmes Chengdu J-20, avion de chasse furtif prĂ©vu pour une Initial Operational Capability en 2018, ou Shenyang FC-31, avion de chasse de cinquiĂšme gĂ©nĂ©ration. À ce stade, la capacitĂ© opĂ©rationnelle comme l’avenir de ces programmes restent toutefois entourĂ©s d’un certain secret : le J20 ne sera-t-il qu’un dĂ©monstrateur technologique ? Quelles sont ses rĂ©elles aptitudes ? Le FC-31 n’est-il vouĂ© qu’à l’exportation ? Toujours est-il que ces programmes dĂ©montrent que le savoir-faire chinois a su se hisser au premier rang mondial. EnïŹn, la Chine, comprenant la nĂ©cessitĂ© d’accentuer sa puissance stratĂ©gique sous-marine, a mis au point un SNLE de troisiĂšme gĂ©nĂ©ration prĂ©vu pour 2020-2025 (sous-marin nuclĂ©aire lanceur d’engins type-095). Pour couronner l’ensemble, PĂ©kin a fortement dĂ©veloppĂ© ses capacitĂ©s cyber et spatiale, lui permettant d’envisager des engagements dans tous les champs d’affrontements futurs. En particulier, il est aujourd’hui acquis que la Chine dispose, d’une part, de moyens cyber-offensifs et, d’autre part, de systĂšmes de destruction de satellites par des armes Ă  Ă©nergie dirigĂ©e ou de missiles tirĂ©s depuis le sol.

Pour autant, les États-Unis restent incontestablement l’hegemon mondial et rĂ©gional

Le budget de dĂ©fense amĂ©ricain est 3,5 fois plus important que celui de la Chine. En 2016, il s’élĂšve Ă  611 milliards de dollars soit 36 % des dĂ©penses militaires mondiales. En 2017, il atteindra 620 milliards de dollars et le CongrĂšs a votĂ©, ïŹn 2017, un budget 2018 approchant les 700 milliards de dollars c’est-Ă -dire bien au-delĂ  des demandes du PrĂ©sident Trump. Pendant ce temps, les dĂ©penses chinoises avoisinent les 215 milliards de dollars en 2016, soit environ un tiers de celles des États-Unis mais toutefois quatre fois plus que celles de pays comme la France ou le Royaume-Uni. Si l’on s’intĂ©resse aux Ă©quipements non conventionnels, les deux puissances nuclĂ©aires sont grandement inĂ©gales. Les États-Unis comptent ainsi 4 670 ogives contre un stock de 260 Ă  300 pour la Chine. Cette capacitĂ© permet notamment aux États-Unis de disposer de la « frappe nuclĂ©aire prĂ©emptive dĂ©sarmante » qui leur permettrait, le cas Ă©chĂ©ant, de surclasser les Chinois. Sur le plan conventionnel, ne serait-ce que quantitativement, la diffĂ©rence est ïŹ‚agrante : « Remarquons que la ïŹ‚otte amĂ©ricaine (26 millions de tonnes) reprĂ©sente la somme des 17 marines qui suivent, dont 14 sont alliĂ©es. En matiĂšre de force aĂ©rienne (avions de combats et de transports, hĂ©licoptĂšres de combat), les États-Unis reprĂ©sentent 25 % du total mondial avec environ 10 000 appareils, les quatre États suivants (Russie, Chine, Japon, Inde) ne totalisant Ă  eux tous que les trois quarts de la ïŹ‚otte [amĂ©ricaine] [14]. » Si la Chine dispose d’ores et dĂ©jĂ  d’un porte-avions, les États-Unis, eux, en ont onze de capacitĂ© unitaire trĂšs supĂ©rieure. Concernant les capacitĂ©s de projection, les AmĂ©ricains disposent d’un large rĂ©seau d’environ 600 bases de par le monde leur permettant de prĂ©-dĂ©ployer des dizaines de milliers d’hommes et d’en accueillir, en cas de besoin, des centaines de milliers. La Chine n’a pas, pour l’instant, de vĂ©ritable stratĂ©gie expĂ©ditionnaire. Sa stratĂ©gie du « collier de perles », qui se veut avant tout Ă©conomique, pourrait nĂ©anmoins lui assurer des points d’ancrage militaire sur les cĂŽtes de l’ocĂ©an Indien. Djibouti fait ïŹgure d’exception avec 400 soldats installĂ©s mais ce nombre devrait considĂ©rablement augmenter dans la dĂ©cennie Ă  venir. En termes d’alliances stratĂ©giques, alors que la moitiĂ© des pays du monde peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme alliĂ©e ou amie des États-Unis, la Chine ne peut en dire autant. Les alliances militaires formelles le montrent clairement : lĂ  oĂč les États-Unis totalisent quelque cinquante alliances militaires, la Chine ne dispose que d’un traitĂ© d’assistance avec la CorĂ©e du Nord, en 1960. Quant Ă  l’alliance sino-russe, qui peut ĂȘtre suggĂ©rĂ©e par les rĂ©cents exercices militaires joints et d’importantes exportations d’armements, elle ne rĂ©siste pas aux nombreux points de conïŹ‚its potentiels entre les deux gĂ©ants asiatiques [15].

Outre ce surclassement par les AmĂ©ricains, les Chinois doivent aussi gĂ©rer des faiblesses criantes mĂȘme si elles tendent Ă  diminuer. Ainsi, lĂ  oĂč les États-Unis disposent d’une base industrielle et technologique de dĂ©fense (BITD), Ă©tablie, innovante et largement autonome, la Chine dispose d’un outil industriel dont les lacunes sont souvent pointĂ©es du doigt et qui pourrait bien rencontrer rapidement ses limites. Ainsi, les moteurs des avions de chasse J-20 ou de transport militaire Y-20 sont importĂ©s, mĂȘme si des tentatives de production locale sont en cours. De mĂȘme, pour le porte-avions Liaoning comme pour le chasseur J-15, l’inspiration russe est trĂšs forte (Su-33), vu qu’il s’agit avant tout d’innovations incrĂ©mentales Ă  une technologie conçue hors de Chine. En outre, les transferts de technologie et les coopĂ©rations internationales sont restreints pour la Chine (embargo et systĂšme de recherche assez hermĂ©tique obligent). EnïŹn, au niveau organisationnel, l’APL souffre de structures de commandement dĂ©ïŹcientes. Ainsi, alors que la coopĂ©ration interarmĂ©es et la rapiditĂ© d’exĂ©cution sont dĂ©terminantes sur les champs de bataille contemporains, les chaĂźnes de commandement chinoises sont diluĂ©es et sont encore Ă©loignĂ©es d’une culture de coopĂ©ration opĂ©rationnelle entre armĂ©es. Une des causes principales est la prĂ©sence de commissaires politiques, avec une hiĂ©rarchie parallĂšle et indĂ©pendante, qui alourdit le commandement et la prise de dĂ©cision. L’APL reste encore l’armĂ©e du Parti communiste et non celle de la nation chinoise. La Chine ne semble donc pas totalement prĂȘte, structurellement, Ă  affronter un conïŹ‚it de haute intensitĂ© ou une crise on interne d’importance et encore moins de prendre part Ă  une intervention internationale complexe.

La Chine pourrait toutefois parvenir, Ă  moyen ou long terme, Ă  asseoir la maĂźtrise de son environnement proche

La Chine ne semble pas en mesure, par le seul Ă©quilibre des armes, d’imposer aux États-Unis une forme de « Yalta du PaciïŹque [16] » qui s’appuierait sur un dĂ©coupage convenu de zones d’inïŹ‚uences et d’accĂšs libre. De fait, la Chine ne dispose actuellement que d’un porte-avions quand six porte-avions amĂ©ricains de classe Nimitz, tels l’USS Ronald Reagan, sont prĂ©sents dans le PaciïŹque. Ces bĂątiments dĂ©placent 100 000 tonnes, contre 60 000 pour le Liaoning, ce qui traduit une puissance plus grande de frappe (30 Ă  40 aĂ©ronefs pour le Liaoning contre 90 pour le Reagan). De mĂȘme, du fait de l’absence de catapultes, le Liaoning ne peut accueillir des avions trop chargĂ©s en carburant et en armement. La Chine a beau avoir dĂ©veloppĂ© ses capacitĂ©s technologiques, seules 40 % de ses forces aĂ©riennes semblent en mesure de pouvoir rivaliser avec celles des États-Unis [17] et encore en dehors de toute considĂ©ration de structures de C2 (Command and Control) dont on ne connaĂźt pas la performance mais qui pourraient crĂ©er un dĂ©calage encore plus important vis-Ă -vis des forces amĂ©ricaines. En outre, le manque d’expĂ©rience au combat et d’équipements modernes restent un grand frein aux ambitions chinoises. La Chine n’a pas connu de conïŹ‚it armĂ© depuis la guerre de 1979 [18], contrairement aux États-Unis qui se sont rĂ©guliĂšrement engagĂ©s et continuent de le faire dans de nombreuses opĂ©rations Ă  travers le monde. En outre, en termes d’alliances stratĂ©giques et de conïŹ‚its gĂ©nĂ©ralisĂ©s, la Chine devrait composer avec de nombreux et anciens alliĂ©s amĂ©ricains prĂ©sents dans son voisinage, tels la CorĂ©e du Sud (alliance contractĂ©e en 1953), le Japon (1960) ou les pays de l’Australia, New Zealand, United States Security Treaty (1951). MalgrĂ© son dĂ©classement militaire vis-Ă -vis de l’hyperpuissance amĂ©ricaine, la Chine est reconnue comme un acteur gĂ©opolitique et militaire de tout premier plan que les États-Unis ne peuvent ignorer dans leur ambition dans le Sud-Est asiatique et qui est en mesure de freiner toute vellĂ©itĂ© d’action armĂ©e dans la rĂ©gion. À cet Ă©gard, le programme « 998 » de Jiang Zemin vise Ă  dĂ©velopper une capacitĂ© A2/AD (Anti Access, Area Denial) qui est une façon de dĂ©limiter une aire d’interdiction et de dĂ©courager sa pĂ©nĂ©tration, en mer et dans les airs, par une puissance Ă©trangĂšre. Ainsi, un contrat avec la Russie pour la livraison de missiles S400 est entrĂ© en opĂ©ration en 2017. Ces systĂšmes sol-air de grande et moyenne portĂ©e ont une capacitĂ© de dĂ©tection de plusieurs centaines de kilomĂštres (on parle de 600) et sont en mesure d’abattre avions, drones et missiles de croisiĂšre hypersoniques. Par ailleurs, les missiles nuclĂ©aires DF-21 et DF-26 auraient Ă©tĂ© adaptĂ©s pour les transformer en arme conventionnelle hypersonique capable de traiter des cibles stratĂ©giques dans un rayon de quelques milliers de kilomĂštres (on parle de 4 000). On pense bien entendu Ă  la capacitĂ© de destruction de porte-avions mĂȘme si, Ă  ce jour, aucun test ne semble avoir Ă©tĂ© entrepris sur des cibles mobiles. Mais le surnom de « tueurs de porteavions » a immĂ©diatement Ă©tĂ© donnĂ© Ă  ses missiles balistiques et les États-Unis prennent trĂšs au sĂ©rieux cette menace d’interdiction des eaux du Sud-Est asiatique. Si les États-Unis venaient Ă  s’engager dans un conïŹ‚it lourd contre la Chine, avec l’ensemble des facteurs de puissance que nous avons dĂ©crits, il est fort probable que l’issue leur soit favorable s’il demeure non nuclĂ©aire. NĂ©anmoins, cette option Ă©tant plutĂŽt improbable, l’armĂ©e chinoise se ïŹxe pour objectif de contenir une offensive d’ampleur limitĂ©e avec une opposition qui dĂ©couragerait les États-Unis d’engager plus avant leurs forces. Cette stratĂ©gie de dissuasion semble pouvoir fonctionner. Elle est facilitĂ©e par le fait que les États-Unis sont engagĂ©s dans d’autres conïŹ‚its sur lesquels ils pensaient ne plus avoir Ă  se mobiliser (en Europe avec l’Ukraine et les pays baltes pour Ă©viter de nouvelles incursions russes comme en CrimĂ©e ; en Irak et en Syrie pour lutter contre le terrorisme). En outre, la visite de Donald Trump Ă  PĂ©kin, en novembre 2017, a montrĂ© sa bonne disposition vis-Ă -vis de la Chine et sa volontĂ© de privilĂ©gier la dimension Ă©conomique Ă  l’affrontement idĂ©ologique, quitte Ă  revenir sur des engagements de son prĂ©dĂ©cesseur [19]. La ïŹn de la stratĂ©gie du « pivot », annoncĂ© en 2011 et amorcĂ©e sous Barack Obama, pourrait bien se conclure sous Donald Trump et les États-Unis se prĂȘteraient de fait Ă  une forme de passage de relais Ă  l’hegemon rĂ©gional que pourrait ĂȘtre la Chine. Au-delĂ , la stratĂ©gie de la « tache d’huile 37 » mise en Ɠuvre par PĂ©kin, aussi bien en mer de Chine que sur l’axe du « collier de perles », pourrait bien rendre caduque la stratĂ©gie navale amĂ©ricaine, supĂ©rieure technologiquement mais ne pouvant assurer une domination globale des ocĂ©ans.

 

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